Système_Turfu. La « débrouille » comme économie de la résilience dans le secteur culturel et artistique bruxellois

Qu’adviendrait-il à Bruxelles si l’action de l’État-providence se réduisait à néant vis-à-vis des jeunesses bruxelloises dans un futur proche ? Comment la « paix sociale » toujours en sursis tiendrait-elle encore plus longtemps, comment la société garantirait-elle une écoute et comment maintiendrait-elle un lien avec ces espaces d’expression portés par les jeunesses de la Région de Bruxelles-Capitale ?   

L’effondrement des structures institutionnelles formelles dans les arts et la culture à Bruxelles constitue notre « crise » de départ: imaginons des coupes budgétaires entamées par un Etat autoritaire. On s’attend à ce que le « climax » biopolitique atteint en période pandémique parachève l’érosion de la résilience chez les jeunes habitant dans les poches denses de Bruxelles. Mais on voit apparaître dans les « ruines du capitalisme » (Tsing 2015), des modes de (sur)vie juvéniles basés sur l’expression audiovisuelle. Par exemple, la « camérisation du monde » (Dufresne 2020) oblige, le contre-journalisme digital par téléphone portable sur les violences policières, ou les clips documentaires sur le lock down ou encore des capsules humoristiques sur la situation sanitaire (Code rouge, Caméra Quartier) tournés sur l’amplification des injustices structurelles liés à la crise du Covid-19 dans l’ère de l’anthropocène, à partir des quartiers bruxellois… 

Sur quels moyens et mécanismes de production repose cet élan de vitalité dans les quartiers de Bruxelles? Sans doute est-ce parce que la résilience est indispensable à la survie que la création n’a jamais l’air de s’interrompre dans ces quartiers malgré la faiblesse de ces moyens matériels et des compétences officielles instituées en techniques audio-visuelles? Sans doute cela signale-t-il que l’art et la culture sont des domaines « essentiels » à la reproduction de la vie sociale, voire à la cocréation de son futur viable et durable pour tous? Dans ce cas, les expressions artistiques gagneraient à être repensées comme pans de l’écologie urbaine globale.  

Notre projet part de l’hypothèse que la crise est depuis plus ou moins 30 ans présente chez nos publics-cibles et que, par l’économie de la débrouille de l’art et les subsides publics, la résilience garde le cap. Mais partant d’ un scénario (par extrapolation) où les  subventions feraient défaut, que se passerait-il…?

A partir d’un design de recherche prospectiviste qui mêle la méthodologie scientifique aux imaginaires futuristes tournée vers 2040 et plus loin, ce projet est mené en consortium par des universitaires et des experts/acteurs du terrain.